Aménager un bureau dans un bail

Interview du cabinet ns avocat, spécialisé en immobilier commercial


Qui êtes vous et pourriez vous présenter votre activité ?

Nous sommes un cabinet d’avocat spécialisé en immobilier commercial et plus particulièrement en baux commerciaux.

Nos clients sont principalement des bailleurs (personnes physiques, SCI, gestionnaires de parcs immobiliers, foncières, personnes publiques) et des locataires (allant de l’entrepreneur individuel à l’enseigne nationale ayant plusieurs fonds de commerce). 

Nous accompagnons nos clients lors de la prise à bail de leurs locaux, lors du renouvellement, afin de fixer à la hausse ou à la baisse leur loyer. De même, nous intervenons avant qu’un litige n’apparaisse ou en contentieux.

Notre approche vise à apporter une solution rapide, efficace, pragmatique (c’est-à-dire avant tout économique), intelligente. Et, dans la mesure du possible, éviter tout contentieux et privilégier une voie amiable (plus rapide, moins coûteuse, et préférable pour tout le monde).

Dans un contrat de bail, quels sont les points sensibles qui concernent les travaux d’aménagement ?

Lors de la prise d’effet du bail, le locataire doit souvent aménager les locaux qu’il s’apprête à prendre à bail afin de les rendre propres à leur activité. 

En tout premier lieu, il est donc indispensable, pour tout preneur, et avant la prise à bail, de s’assurer que les locaux peuvent être aménagés conformément à l’usage projeté. Si l’accord de la copropriété ou de la mairie est nécessaire, il est impératif de s’assurer que ces autorisations ne seront pas un point bloquant (en cas de doute, une condition suspensive peut aider).

Vis-à-vis du bailleur, il est préférable de se faire pré-autoriser ses travaux initiaux d’aménagement (en fournissant les plans et devis de travaux) dès la conclusion du bail. 

Le bailleur et la copropriété pourront demander l’intervention de leur architecte et/ou d’un bureau de contrôle pour s’assurer de la faisabilité et de la viabilité des travaux entrepris afin d’éviter tout dommage ultérieur sur les locaux loués ou ceux de tiers.

Préparer en amont ces travaux, lorsque l’on est preneur, est un préalable essentiel en ce qu’il permet de gagner du temps (et d’éviter des demandes ultérieures, de rétro-pédaler pour obtenir des autorisations en dernière minute), et ainsi de les démarrer au plus vite pour ouvrir son commerce dans les temps.

Quelles sont les obligations du preneur en cas de travaux : Quelles pièces dois-je communiquer à mon bailleur ?

Les plans DWG, les devis de travaux, cahiers des charges et rapports de bureaux de contrôle et de bureaux d’étude sont nécessaires en fonction de la nature des travaux envisagés.

Dans quel état dois-je lui laisser ses locaux en fin de bail ? Mon bailleur peut-il me demander de démolir tous mes travaux en fin de bail ?

La clause de restitution prévoit, en fonction de la sévérité des baux (mais aussi de l’état initial des locaux), que les locaux devront être rendus comme neufs, en très bon état, ou en bon état.

Un bailleur qui délivre à son locataire des locaux neufs, aura tendance à demander une remise à neuf des locaux. Si les locaux sont en bon état ou en très bon état lors de la prise à bail, il est dès lors préférable de prévoir une restitution dans un état similaire.

Les enjeux financiers sont parfois lourds selon les surfaces et l’état initial des locaux. D’où l’importance, à ce titre, de prévoir un état des lieux précis qui protègera tant le preneur que le bailleur.

La remise en l’état initial des locaux (c’est-à-dire selon l’aménagement initial) est quasi systématique. Cela signifie que tous les travaux effectués par le locataire peuvent être démolis et déposés par celui-ci, à son départ, et à ses frais. Cette question est d’autant plus importante pour des remises en l’état coûteuses telles que les déposes de coffres forts de banques.

Les clauses de restitution peuvent être strictes (remise en l’état obligatoire, remise en l’état ou conservation des aménagements au choix du bailleur, ou remise en l’état sauf pour les travaux expressément autorisés). Le preneur qui prend à bail des locaux doit intégrer le coût de dépose et de démolition. Cette question se pose aussi pour la personne qui reprend un fonds de commerce en cours de bail, et qui sera tenu de la remise en l’état, conformément à l’état des lieux d’entrée.

Quelles sont les obligations du bailleur en cas de travaux :

  • Mon bailleur a-t-il l’obligation de me fournir les plans de mes locaux ?

  • Mon bailleur doit-il me fournir les diagnostics techniques de mes bureaux ?

  • Mon bailleur doit-il me fournir le capacitaire incendie ?

  • Mon bailleur doit-il me fournir le capacitaire d’une mezzanine ?

Avant la signature du bail, et dès lors que le locataire a visité les locaux et doit faire établir, par son architecte, des plans d’aménagement, le bailleur est tenu de fournir un certain nombre de documents. Parmi ceux-ci, on retrouve le plan des locaux, les diagnostics techniques (dossier technique d’amiante, diagnostic de performance énergétique, état des risques et pollutions - constat des risques d’exposition au plomb et de termites en cas de partie affectée à un usage d’habitation).

Tous les documents ne sont pas légalement obligatoires mais peuvent, contractuellement, et en cas de défaut, engager la responsabilité du bailleur au titre du manquement à son obligation d’information. Cependant, l’omission de produire certains documents est parfois plus lourde de conséquence. A titre d’exemple, il a été jugé que le défaut de fournir d’un état des risques et pollutions (ERP) à jour pouvait entraîner la résiliation du bail aux torts du bailleur.

Légalement, le bailleur doit informer le preneur des travaux effectués dans le local au cours des trois dernières années et au cours des trois prochaines.

Tous les documents pouvant être importants pour la parfaite information du locataire doivent être fournis. Cela comprend, par exemple, le règlement de copropriété, les états modificatifs, les trois derniers procès-verbaux d’une assemblée générale de copropriétaires pour informer le locataire des types et coûts de travaux prévus au cours des prochaines années ou déjà votés. De même, les capacitaires d’une mezzanine ou incendie en font partie.

Qu’est ce que la “destination” d’un local?

La destination d’un local peut recouvrir plusieurs aspects (urbanisme, code de la construction et de l’habitation, copropriété, bail commercial).

Au sens de l’urbanisme, la notion de destination a été créée afin de limiter et d’encadrer les travaux et constructions effectuées sur une commune, selon un plan local d’urbanisme (PLU). La destination d’un bâtiment en urbanisme correspond à l’utilisation pour laquelle le bâtiment a été construit (il en existe 5 au sens de l’article R. 151-27 du Code de l’urbanisme. Des sous-destinations existent également et sont au nombre de 20 (article R. 151-28 du Code de l’urbanisme). Leur changement fait, selon la teneur des travaux, l’objet d’une déclaration préalable en mairie ou d’un permis de construire.

Au sens du bail commercial, la destination correspond à l’activité contractuellement autorisée dans les locaux loués. Cependant, elle doit être en conformité avec la destination au sens de l’urbanisme. Un local à destination d’habitation ne pourra pas permettre la conclusion d’un bail commercial avec une activité, par exemple, de boulangerie. De même, si l’activité prévue par le bail commercial est celle de bureaux, il sera nécessaire de faire un changement de destination si, par exemple, le local à une destination (au sens de l’urbanisme) commerciale.

Au sens d’un règlement de copropriété, la destination prévoit généralement des activités commerciales ou professionnelles (professions libérales) ou d’habitation. Il ne s’agit pas d’une définition légale de la destination, cependant, lors de la conclusion d’un bail commercial, il convient de s’assurer que la destination du local, telle que prévue par le règlement de copropriété, est permissive quant à l’activité contractuellement prévue. Le tout, sous peine de voir le bail résilié (aux torts du bailleur, puisqu’il est tenu par une obligation de délivrance d’un local conforme à l’activité prévue).

Au sens du code de la construction et de l’habitation, il n’est pas prévu de “destination” mais d’ “usage”. L’usage renvoie, non pas à ce pourquoi le local a été construit, mais l’usage effectivement exercé à l’intérieur. L’article L631-7 du code de la Construction et de l’habitation pose donc deux types d’ensembles de locaux : “Habitation” et “Autres qu’habitation”. Le passage du premier au second type nécessite une autorisation qui peut être conditionnée à la réalisation d’une compensation, c’est-à-dire la transformation en habitation de locaux affectés à un autre usage qu’habitation. C’est notamment le cas à Paris.

Qu’entend t-on par “commercialité” ?

La commercialité peut renvoyer à plusieurs aspects. Un aspect économique qui recouvre l’achalandage d’un local. La commercialité découle de sa situation géographique, du type de commerce qui y est exercé. Plus un local est achalandé et visible, plus sa commercialité est forte.

La commercialité peut renvoyer également à un aspect légal, à savoir sa destination aux yeux de la réglementation urbanistique. La commercialité étant, dès lors, le fait, pour un local, d’être à destination commerciale. La commercialité d’un local ne dépend donc pas du fait qu’un bail commercial a été conclu pour son exploitation, mais du fait qu’il est reconnu par la commune comme étant à destination commerciale.

Est-il possible d’installer ses bureaux dans un appartement que l’on loue ? Quelles sont les démarches ?

Cette faculté dépend de plusieurs facteurs.

Premièrement, s’il y a un règlement de copropriété, (dans le cas où le local serait situé dans un immeuble soumis au statut de la copropriété), il faut que le règlement de copropriété l’autorise.

S’il existe un règlement de copropriété, il conviendra de vérifier que le local à la destination professionnelle ou commerciale. S’il s’agit d’un local d’habitation, il conviendra de s’assurer que l’exercice d’une activité professionnelle y est possible (et dans quelles conditions).

Dans le cas où le local est déjà un local commercial ou de bureau, cela ne posera pas de difficultés. Dans le cas où il s’agit d’un appartement, outre l’autorisation de la copropriété qui peut être nécessaire, celle de la mairie l’est (en fonction des villes).

C’est notamment le cas dans les villes du 92, du 93 et du 94, et dans les communes de plus de 200 000 habitants ou celles qui ont décidé d’appliquer cette législation. Dans ce cas, une dérogation à titre personnelle du changement d’usage doit être demandée.

Si l’usage professionnel est octroyé par la mairie, cet octroi est personnel (c’est-à-dire lié à la personne qui a demandé une dérogation) et n’est pas lié au bien lui-même (qui n’acquiert pas de commercialité à proprement parler). Dès lors que l’activité de la personne ayant demandé une dérogation prendra fin, le local retrouvera son usage initial.

Peut-on acheter un appartement de logement pour y installer ses bureaux ? Quelles sont les démarches ?

La réponse est similaire à la question précédente. Dès lors que l’usage à des fins de bureau est personnel, et pour sa propre activité, cela est envisageable. Si l’appartement est acheté aux fins de bénéficier de revenus fonciers consécutifs à une location en bureau à un tiers, cela n’est pas possible car l’activité du bailleur devient commerciale.

Le bailleur doit informer le preneur des travaux effectués es trois dernières années

Le bailleur doit informer le preneur des travaux effectués es trois dernières années